C’est un mythe qui est tombé ce dimanche au stade Charléty de Paris. En franchissant 2,10 m dès sa première tentative, Yaroslava Mahuchykh a effacé les 2,09 m de Stefka Kostadinova, qui trônaient en haut des tablettes du saut en hauteur depuis le 30 août 1987. L’Ukrainienne n’en était pas à son coup d’essai sur cette barre, sur laquelle tant d’athlètes se sont cassé les dents, mais cette fois, les planètes étaient alignées. « Cela faisait deux ans que j’avais ce record dans la tête. Après avoir passé 2,07 m, ma coach m’a laissé le choix de continuer ou d’en rester là. Comme je m’étais sentie très facile sur mon deuxième essai à 2,07 m, j’ai décidé de me lancer », expliquait-elle, un drapeau jaune et bleu sur les épaules. L’ensemble de ses concurrentes est venu lui donner l’accolade après son exploit, avec sans doute à l’esprit qu’elle serait très difficile à battre dans une vingtaine de jours au Stade de France.
L’histoire d’amour entre Faith Kipyegon et Paris continue. La demi-fondeuse kenyane, qui avait pulvérisé le record du monde du 5000 m dans la capitale française en 2023, a cette fois amélioré son chrono de référence planétaire sur le 1500 m. Poussée dans ses retranchements par l’épatante Australienne Jessica Hull, Kipyegon a réalisé une dernière ligne droite toute en puissance pour se détacher, et bloquer le tableau d’affichage sur 3’49’’04. C’est sept centièmes de mieux qu’à Florence (Italie) le 2 juin 2023. « Je savais depuis mon bon chrono aux sélections kényanes que j’étais suffisamment en forme pour battre le record du monde. L’énergie du stade était très forte, et ça nous a vraiment poussées jusqu’à la ligne, avec Jessica », remettait-elle après coup.
Dans sa foulée ou presque, Hull a amélioré le record d’Océanie pour le porter à 3’50’’83, explosant son record de plus de cinq secondes. Les records de Grande-Bretagne et de France ont également été dépoussiérés, par Laura Muir (3’53’’79) et Agathe Guillemot (3’58’’05), dans une course où les huit meilleures sont allées plus vite que jamais dans leur vie.
Deux tours pour l’histoire
Les statistiques du 800 m masculin sont comparables, avec huit records personnels, et quatre records nationaux parmi les huit premiers. La décision a été encore plus indécise, puisque les trois premiers se tenaient en cinq centièmes à l’issue d’une ligne droite qui restera dans les mémoires. En tête depuis le retrait du lièvre, Emmanuel Wanyonyi a fini par plier dans les tout derniers mètres face à l’assaut de Djamel Sedjati. L’Algérien a coupé la ligne en 1’41’’56, ce qui fait de lui le troisième coureur le plus rapide de l’histoire sur la distance, derrière ses compatriotes David Rudisha et Wilson Kipketer. Deuxième à deux centièmes, Emmanuel Wanyonyi s’est sans doute débarrassé d’un peu de cette pression liée au statut de meilleur performeur mondial, qu’il évoquait la veille en conférence de presse. Revenu de l’arrière comme un mort de faim, Gabriel Tual est venu mourir sur leurs talons, explosant le record de France de Pierre-Ambroise Bosse (1’42’’53 en 2014 à Monaco), faisant même mieux que le légendaire Sebastian Coe.
Armand Duplantis a, comme souvent, fait frissonner le public, mais le vent soufflant sur l’enceinte française a eu raison de ses ambitions de record du monde à la perche. N’ayant pu s’aventurer qu’une seule fois en l’air à 6,25 m, le Suédois est retombé sur la barre, pour sa dernière compétition de préparation avant les Jeux olympiques. Son saut précédent, à 6 m, lui a néanmoins permis de s’assurer la victoire face à Sam Kendricks (5,95 m).
Zhoya fait rêver la France
Sasha Zhoya a, lui aussi, fait lever ses (très nombreux) supporters dans les tribunes, en remportant in extremis le 110 m haies en 13’’15, égalant son record malgré une course tumultueuse. Le Français était pourtant le dernier qualifié pour la finale, ayant arraché son billet au millième près lors des demi-finales. Il a devancé l’Américain Trey Cunningham, également crédité de 13’’15, et le Japonais Shunsuke Izuyima (13’’16).
L’arrivée du 3000 m steeple s’est avérée tout aussi haletante, puisque le lauréat éthiopien Abrham Sime et son dauphin kényan Amos Serem ont été classés dans le même centième, en 8’02’’36. Le scénario plus fluide de la course féminine a vu la victoire de Winfred Yavi, en 9’03’’68, devant la Française Alice Finot, dont le nouveau record national en 9’05’’01 a enchanté ses fans.
Alison Dos Santos s’est montré impérial sur 400 m haies, en dominant la course sans frémir en 47’’78, devant un Rasmus Magi revenu à son meilleur niveau (47’’95). Marileidy Paulino n’a pas connu plus de difficultés pour triompher sur le tour de piste, sans obstacle, réservé aux femmes. En 49’’20, la Dominicaine n’a laissé aucune chance d’espérer à ses rivales. Le 200 m masculin s’est offert à son compatriote Alexander Ogando, le seul à passer sous les 20’’ (19’’98), tandis que le 100 m féminin a souri à Patrizia van der Weken, en 11’’06.
La championne olympique du disque Valarie Allman s’est parfaitement mise en confiance, à quelques semaines de la défense de sa couronne, en tuant tout suspense d’entrée de concours. L’Américaine a ensuite parachevé son succès avec un ultime jet mesuré à 68,07 m. L’Allemand Julian Weber a décroché la toute première victoire de sa carrière en Diamond League en lançant son javelot à 85,91 m, malgré une grosse fatigue liée à sa charge d’entraînement. Enfin, Larissa Iapichino a raflé la mise en longueur, à la faveur de son troisième essai à 6,82 m.